Le travail en grand ou petit groupe à l’école est généralement favorable aux apprentissages. En effet, il permet de susciter des conflits socio-cognitifs et d’établir des débats en confrontant les représentations des élèves sur un sujet donné. On constate que ce type de dispositif peut induire des progrès significatifs au sein d’un groupe impliqué dans une tâche, même si aucun des membres n’est plus avancé que les autres. C’est la qualité des interactions entre élèves qui est source de progrès. Ce phénomène est subordonné au climat régnant dans la classe : écoute des autres, respect du tour de parole, coopération…
Pour les élèves malades, ces apprentissages en groupe peuvent revêtir une importance particulière. En effet, fréquemment, ces jeunes sont absents du fait de rééducations ou d’hospitalisations et se retrouvent en situation d’apprentissage seuls avec un adulte (enseignement reçu au chevet à l’hôpital, à domicile). Or, dans la classe, les travaux en petits groupes notamment favorisent leur insertion au sein du groupe de pairs et répondent à certains de leurs besoins éducatifs particuliers : besoins d’appartenance, besoins d’estime, besoins d’accomplissement de soi. La réponse à ces besoins constitue un appui essentiel pour leur réussite dans les apprentissages.
Les répercussions des maladies sur la scolarisation peuvent entraîner des besoins éducatifs particuliers (BEP). Pour l'école, il s'agit en premier lieu de faciliter l'accès aux apprentissages pour les élèves, qu'ils soient malades ou non, en mettant en œuvre des pratiques bénéfiques à tous (Voir les fiches de la rubrique jaune "Rendre l'école accessible"). Mais pour certains jeunes malades, des aménagements spécifiques doivent être réalisés, concernant la vie scolaire et/ou les temps de classe. Il s’agit de leur permettre d'apprendre au mieux de leurs capacités, dans un contexte favorable et grâce à des adaptations pédagogiques individuelles ou au sein de petits groupes.
Dans un groupe hétérogène, des élèves de niveau moyen réussissent mieux, en termes d’apprentissage de connaissances, de savoir-faire, de quantité et qualité de travail réalisé que lors d'un travail individuel. Leurs résultats ensuite lors des évaluations individuelles le confirment.
Les interactions et la communication entre pairs induisent d’autres stratégies d’apprentissage qui en général se révèlent plus efficientes.
“ L'activité gestuelle se développe, l'activité parlée se porte sur un autre mode, plus prospectif, c'est une négociation positive. Le groupe constitué crée un espace intime de communication où on peut facilement observer des gestes d'auto-contacts ludiques, des postures de confort intellectuel, une communication facilitée entre membres de même valeur.” (Voir Le travail en groupes : réflexions et exemples, de François Muller, à partir des travaux d’André de Peretti).
Il arrive souvent qu’au sein de groupes de 4 ou 5 élèves, chacun trouve spontanément un statut propre qui améliore la synergie de l'ensemble du collectif. Par exemple, les élèves s’impliquent dans des rôles différents et complémentaires, (qui peuvent cependant varier d’un moment à l’autre) :
→ “animateur” : tendance à lancer des interventions dans toutes les directions, à se mettre en position de diriger
→ “vérificateur” : tendance à répéter les consignes, à corriger les réponses en fonction de l’interprétation de la demande
→ “quêteur” : tendance à demander aux autres
→ “indépendant” : tendance à être peu communicatif, à se mettre en retrait.
Sur le plan pédagogique, à condition de ne pas multiplier les objectifs d'apprentissage et de rester modeste pour une séquence, le travail en petits groupes induit une meilleure utilisation du temps pour l’enseignant concernant le dialogue avec les élèves, le conseil pédagogique, méthodologique, la mise en place de tutorat. Il réduit les temps morts d'explication pour les autres élèves.
La complémentarité des compétences des élèves prévient les situations de blocage ou d'impasse.
Au niveau de la socialisation, le travail en petits groupes permet aux élèves de développer des compétences sociales : médiation, coopération, entraide, communication, autonomie. C’est important pour tous les élèves, et encore plus pour les élèves malades dont on a évoqué précédemment le risque d’isolement.
Sur un plan psychologique pour tous les élèves, ces dispositifs peuvent permettre de dédramatiser les difficultés, de réduire l'anxiété, de valoriser les compétences en donnant un rôle, une responsabilité, de créer du sens par le plaisir de la situation d'apprentissage. Avec des jeunes confrontés à l’anxiété et au découragement liés à la maladie, ces aspects sont essentiels pour les aider à se valoriser.
Il y a beaucoup de manières différentes d’envisager les groupes. De façon classique, on peut tout d’abord distinguer :
Quelle que soit la modalité choisie, l’enseignant a toujours un rôle régulateur pour veiller au bon fonctionnement de chaque groupe.
Les groupes par affinités
Les élèves sont ainsi invités à faire un choix, celui des camarades avec lesquels ils souhaitent travailler. Donner à choisir est un acte éducatif important pour apprendre aux élèves à être et à agir dans le monde actuel, complexe et rapidement évolutif. C’est particulièrement utile à certains élèves malades, objets plus que sujets des soins qui leur sont prodigués et parfois encouragés à la passivité dans le cadre thérapeutique. Le fait de choisir peut favoriser la construction de leurs apprentissages en les conduisant à réfléchir au sens qu’ils donnent à ce qu’ils apprennent, sur ce qui les motive, sur la manière dont ils apprennent. Ces réflexions doivent être accompagnées par le maître. Certains temps d’échanges doivent leur être consacrés au sein du groupe-classe. Comment choisir un groupe de travail : en fonction de la proximité avec certains camarades, en fonction des compétences de tel ou tel camarade (à l’oral, à l’écrit, pour compter, schématiser, se concentrer…) ; en fonction des contenus du travail si les groupes ont des activités différentes, etc.
Les groupes de besoins
Ces groupes sont constitués d’élèves qui ont un même besoin à un moment donné de leur parcours :
Ces groupes de besoins sont donc centrés sur un apprentissage. Ils sont homogènes par rapport à cet apprentissage et doivent être conçus comme temporaires. Il faut éviter de les transformer en groupes de niveaux durables, composés en permanence des mêmes élèves. Les groupes de niveaux ne sont pas favorables aux élèves en difficulté. Ils sont stigmatisants et peu efficients. Ils accroissent les écarts entre “forts” et “faibles”.
La composition des groupes de besoins s’appuie sur une évaluation préalable.
Avec les groupes de besoins, on peut présenter à l’élève un enseignement à sa portée dans lequel il peut s’impliquer. Du fait de leur homogénéité ils sont plus faciles à gérer pour l’enseignant.
La mise en place de groupes de besoins peut par exemple se faire sur une ou deux plages par semaine et au bout de 4 séances, un point est réalisé sur les acquis des élèves et, selon les constats, de nouveaux groupes sont constitués, poursuivant le même travail pour certains, se centrant sur d’autres contenus pour d’autres.
Il est plus facile d’organiser ces groupes entre plusieurs enseignants et ce peut être l’occasion d’une collaboration entre enseignants des classes ordinaires et enseignant-coordinateur d’Ulis (Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire).
Les groupes de niveau hétérogène
Les groupes de niveau hétérogène sont plus propices à la progression des élèves en difficulté, sans nuire aux élèves les plus avancés. En effet, le fait pour ces derniers d’être conduits à expliquer certains points à leurs camarades renforce leurs propres apprentissages. Il est généralement intéressant de constituer des équipes de 4 ou 5 élèves. Il est nécessaire de procéder progressivement. Afin que les élèves s’investissent réellement dans le travail, il est préférable, pour ce type de dispositif, de commencer par des temps limités, qui seront accrus peu à peu.
Les consignes, la durée et les rôles de chacun doivent être très clairement explicités. Même si les élèves travaillent en autonomie, l’enseignant a un rôle de régulation si nécessaire tout au long du processus. C’est aussi pour lui l’occasion de pouvoir observer les réussites et les difficultés des élèves.
Il est indispensable de prévoir une succession de travaux en équipe et de phases individuelles pour favoriser la personnalisation des synthèses et des apprentissages. Chaque élève peut construire seul sa synthèse, en profitant des interactions qui ont eu lieu dans le groupe. Il peut ainsi s’appuyer sur les autres tout en restant responsable de ses apprentissages.
Un temps de synthèse en grand groupe doit clore la réflexion jusqu’à la séance suivante.
Certains élèves malades du fait de leurs absences fréquentes, de leur fatigabilité, des douleurs qui influent sur leur attention, leur concentration et leur mémorisation sont en difficulté. Ils peuvent grandement tirer bénéfice du travail en petits groupes, à condition que le niveau sonore de la classe ne soit pas trop élevé pendant ces phases. Quand ces élèves sont hospitalisés ou scolarisés à domicile, ils peuvent être inclus dans des travaux de groupe grâce à un robot de téléprésence, qui leur permet d’échanger avec leurs camarades en temps réel.
Une grande variété d’activités peuvent être proposées. Il ne s’agit pas de “ travailler en petits groupes pour travailler en petits groupes”. Il faut réfléchir en termes d’organisation pédagogique la plus adaptée en fonction des connaissances et compétences à acquérir.
On peut envisager les activités sous plusieurs angles : entraînement, production, compréhension. Voici quelques exemples :
Entraînement
Production
Compréhension
Selon l’organisation prévue, les rôles des élèves peuvent être différents :
L’expérimentation d’une multiplicité de rôles est très importante pour des élèves souvent confinés au rôle de “malades”. Ils découvrent ainsi de nouvelles responsabilités et de nouvelles potentialités, qui peuvent les valoriser et affermir leur confiance en eux.
Le travail en petits groupes est généralement bénéfique pour les élèves malades car il facilite leur inclusion au sein du groupe de pairs et favorise leur autonomie. Ceux d’entre eux qui sont en difficulté peuvent bénéficier de l’aide de camarades plus avancés ou bien, inversement, l’élève malade peut être valorisé en étant tuteur d’un autre élève.
L’enseignant conserve toujours un rôle essentiel de régulation des échanges dans les groupes pour que les interactions soient respectueuses de chacun et propices aux apprentissages sans stigmatisation.
Il doit aussi veiller au niveau sonore de la classe, potentielle source de fatigue supplémentaire pour les élèves malades.
Source : https://www.tousalecole.fr/content/travail-en-petits-groupes